Articles avec le tag ‘stereolux’

Le poto Alex Hervaud nous a proposé de collaborer au magazine culturel gratuit Stereolux en répondant un peu sérieusement à une question :

Le magazine est distribuĂ© Ă  Nantes en ce moment, il est Ă©galement consultable ICI (notre article est en page 24). Si vous n’habitez pas Ă  Nantes et que vous ĂŞtes allergique aux PDF, ci-dessous la version texte.

Dans les semaines qui viennent, Nantes accueillera des concerts de The Coup, IsWhat?! et The Procussions, d’excellents rappeurs qui ont la particularité d’être majoritairement… quadragénaires. Ce qui peut surprendre nos lecteurs qui imaginent que le rap est exclusivement une musique de jeunes. Comment rester frais une fois dépassée la date de péremption ? Analyse des 7 grandes typologies de rappeurs quadra.

Les tontons flingueurs
Rapper ? Pas le choix, ils ne savent faire que ça. Et ils le font bien, même quand ils ont le double de l’âge des mecs d’Odd Future ou de 1995. Pour rester pertinents artistiquement, Eminem, Busta Rhymes, Nas ou Common ont fait évoluer leurs textes avec leurs préoccupations de quadra : leurs divorces, leurs filles qui postent des photos de capotes sur Twitter, la calvitie ou encore la difficulté de faire un créneau quand on a un break sont désormais des thèmes abordables dans le rap. A présent, on attend que Slim Shady écrive un hommage à tous les mecs qui bandent mou.

Les producteurs
C’est une stratĂ©gie qui exige beaucoup d’humilité : ces artistes ont choisi de mettre entre parenthèses leur carrière pour se consacrer Ă  celle des autres. Mais bien souvent, la rĂ©compense est de taille, et ce n’est pas Akon qui va nous contredire. Grâce Ă  Lady Gaga, qu’il a dĂ©couverte et signĂ©e sur son label, le chanteur cainri-cainfri peut se permettre de ne plus travailler jusqu’Ă  la fin du prochain calendrier Maya. En France, les enjeux financiers sont moins importants, mais des rappeurs comme Passi, Zoxea ou encore Pit Baccardi (avec le groupe africain X-Maleya) ont su retrouver un nouvel Ă©lan en produisant d’autres artistes. Ce qui ne les empĂŞche pas de lâcher un 16 mesures de temps en temps, histoire de garder la main.

Les boss du biz
Ils vous vendaient du rĂŞve ? Maintenant, ils ne rĂŞvent que de vendre. Pour ceux-lĂ , le rap est devenu un produit d’appel, un certificat qui leur permet d’occuper l’espace pour mieux nous refourguer leurs produits-miracles. Dr Dre se consacre Ă  prĂ©sent plus Ă  son business de casques audio qu’à son album Detox ; Diddy est obsĂ©dĂ© par le liquide, au point de le vendre sous forme de parfum (« I Am King »), de liqueur (Ciroc), et mĂŞme d’eau (AQUAhydrate). Balaise. A l’autre extrĂ©mitĂ© de la tĂŞte de gondole, on aura une pensĂ©e Ă©mue pour MĂ©nĂ©lik, qui a sorti sans succès une ligne d’habits de golf, pour Kool Shen de NTM, dĂ©sormais homme-sandwich et joueur de poker pro pour Winamax, et enfin pour MC Hammer, qui manage des combattants de MMA et a lancĂ© son propre moteur de recherche. On l’avait pourtant prĂ©venu : CAN’T TOUCH THIS.

Les rois du sac Ă  dos
Un surnom éloquent, d’abord parce que ce bagage est l’un des accessoires cultes de leur public-type (au même titre que la barbe, la bière bon marché et le t-shirt « Le rap c’était mieux avant »). Mais aussi et surtout parce que le sac à dos est le symbole de leur nouveau statut de VRP inlassables : Public Enemy, le Wu-Tang (au mieux, un effectif réduit ; au pire, de vagues membres affiliés), Afu-Ra, D12, Das EFX, AZ, Redman, Masta Ace et autres M.O.P. vagabondent à travers l’Europe, essorant méthodiquement les derniers bastions de puristes du rap nineties. Une démarche qui convient à tout le monde : ignorés dans leur pays, les rappeurs se font ici un trip qui leur ramène des billets et des bisous, tandis que le public ravi voit enfin ses artistes préférés ailleurs que sur des cassettes VHS.

Les reconvertis
Pour rester dans l’actualité, certains rappeurs s’aventurent dans d’autres domaines plus ou moins artistiques. La voie royale ? Une deuxième carrière au cinéma, comme Joeystarr et Ice Cube, voire à la télé comme LL Cool J ou Ice-T (ce dernier a même produit et réalisé un excellent documentaire sur le rap). En cas de désespoir, il reste un ultime recours : la télé-réalité, avec les exemples terribles de Run (de Run DMC), MC Hammer (encore) ou Flavor Flav’, trublion mythique de Public Enemy, qui a fini sa carrière en participant à une version ghetto du Bachelor. Et sinon, vous aviez vu l’émission de cuisine d’Akhenaton ?

Les illuminés

Vous aimez haranguer les foules ? Après avoir été MC, devenez messie. Snoop, Ma$e, Fabe et Shyne se sont ainsi convertis respectivement au rastafarisme, à l’évangélisme, à l’Islam et au judaïsme, mettant plus ou moins entre parenthèses leur carrière de rappeur. Attention : ne pas confondre ces illuminés avec les illuminatis, un autre sous-groupe de leurs confrères.

Le cas Ă  part
Il l’avait annoncĂ© dès le dĂ©but: “40 is the new 30″, et il n’a pas tort. 40 ans passĂ©s, l’impression qu’il en a deux fois moins, Jay-Z est au sommet et rĂ©ussit tout ce qu’il entreprend avec une aisance dĂ©concertante. Au point que ça en devient Ă©nervant. Entre des deals Ă  plusieurs millions de dollars (HP, Ace of Spades, Energizer), une franchise de bars dĂ©diĂ©s au sport (40/40), des diners intimes avec Barack Obama ou Warren Buffet, des festivals qu’il monte de toutes pièces (Made In America), Jay trouve encore le temps de rapper comme un rookie affamĂ© (son Ă©norme couplet sur Clique) et d’avoir son premier enfant avec BeyoncĂ©, l’une des plus douces crĂ©atures arpentant cette Terre. Comme si ça ne suffisait pas, il rĂ©alise aussi un rĂŞve de gosse en ramenant l’Ă©quipe de basket des Nets Ă  Brooklyn, sa ville natale. Et se paie le luxe au passage de cracher Ă  la gueule de ceux qui rĂ©pètent Ă  l’envi “si jeunesse savait, si vieillesse pouvait”.

Twitter @HaterzFr

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